La confiance est le sentiment positif que l’on ressent pour une personne, une institution ou un dispositif technique, et qui nous porte à estimer que celle-ci ou celui-ci est fiable et/ou pourvoyeur de sécurité. Anthony Giddens estime que la confiance éprouvée pour une personne est essentiellement basée sur la foi que l’on a en sa probité[1]. Celle-ci renvoie alors à trois sources différentes : 1. des sentiments (confiance des enfants envers leurs parents), 2. des principes éthiques (confiance du patient envers son médecin), 3. des compétences (confiance de l’automobiliste envers son garagiste). Elle peut également venir de deux de ces sources, voire des trois à la fois. Pour ce qui est de la confiance que l’on place non dans une personne mais dans une institution (une administration publique ou privée, un organisme de contrôle…), elle découle de l’appréciation que nous avons de la compétence et de l’éthique des individus qui la font fonctionner ; et ce même si l’on ne les connait pas personnellement. Ainsi peut-on par exemple faire confiance au corps professionnel des aiguilleurs du ciel, au personnel hospitalier, aux gestionnaires du réseau d’eau potable, etc. Il en est de même pour les dispositifs techniques – les ascenseurs, les avions, le circuit bancaire… – que pour les institutions : nous leur attribuons de la confiance à travers ceux qui les ont construits et les font fonctionner.
La confiance qu’on accorde, directement ou indirectement à ces personnels, est par ailleurs en grande partie tributaire de celle que l’on a vis-à-vis des institutions qui les forment et les certifient ; ainsi qu’envers les organismes de contrôle de leur travail et du matériel qu’ils utilisent. Par exemple, si l’on a globalement confiance dans le travail de la DGAC (Direction générale de l’aviation civile), alors on aura tendance à être rassuré sur la fiabilité des avions, la compétence et le sérieux des pilotes de ligne, le niveau de sécurité des compagnies aériennes autorisées à voler, etc.
Pour le cas qui peut sembler un peu particulier de la monnaie, la confiance est basée sur les mêmes principes. Si on accepte de recevoir en paiement d’un bien ou service une somme d’argent exprimée en une certaine monnaie (euro, dollar, yen…), c’est que nous estimons que la banque centrale qui l’émet est digne de confiance. A contrario, quand la confiance en une devise est entamée, que l’on évalue comme important le risque de voir sa valeur se dégrader, alors on a tendance à s’en débarrasser au profit d’une autre réputée plus sûre. Ou de toute forme de marchandise conservant une valeur stable ; en premier lieu les métaux précieux. Les crises économiques graves, les guerres, extérieures et encore plus civiles, sont généralement génératrices de perte de confiance envers une monnaie. Dans ce cas c’est souvent le dollar qui se substitue à la monnaie nationale, bénéficiant de la confiance qu’on lui accorde partout dans le monde. Pour les risques possédant une forte dimension territoriale, comme par exemple ceux liés à la présence d’un ou de plusieurs sites industriels dangereux ou d’un cours d’eau connaissant régulièrement des phases de crue, la confiance donnée par les habitants à ceux qui les gèrent dépend de plusieurs facteurs. On peut en identifier trois principaux : 1. la plus ou moins grande proximité géographique et institutionnelle qu’ils ont avec les différents acteurs chargés de cette gestion ; 2. la perception par les habitants de la compétence de ces acteurs ; 3. l’estimation faite de leur indépendance par rapport à des préoccupations autres que celles de sécurité. Ainsi, pour leur dire la vérité sur les dangers auquels ils sont soumis et les gérer au mieux, ceux qui résident sur un territoire à risque font généralement plus confiance au maire et autres élus de proximité qu’aux institutions étatiques ou supranationales. L’Union Européenne est à l’inverse celle qui arrive souvent en dernier, son personnel étant souvent jugé à la fois trop technocratique et trop éloigné des réalités de terrain. Par ailleurs, dans le cas du risque industriel, les voisins de sites dangereux se méfient généralement de leurs exploitants, car même s’ils reconnaissent leur savoir technique concernant leurs propres installations et leur compétence pour les faire fonctionner, ils les soupçonnent volontiers de mettre en balance la sécurité du site avec sa rentabilité. Pour les habitants, les investissements de productivité ont tendance à être privilégiés par rapport à ceux assurant la sûreté des process et du site. Les pompiers bénéficient en revanche le plus souvent d’un niveau maximum de confiance, quel que soit le type de risque territorial envisagé. Ils cumulent en effet les trois conditions de la confiance : d’abord ce sont des acteurs de proximité que l’on voit intervenir au quotidien, ensuite ils ont la réputation d’être bien formés et compétents dans leur domaine, enfin, et ce n’est pas le moins important, ils sont perçus comme n’ayant pas d’autre objectif que celui de fournir le plus rapidement possible de l’aide à ceux qui sont en détresse.
[1] « La confiance est un sentiment de sécurité justifié par la fiabilité d’une personne ou d’un système, dans un cadre circonstanciel donné, et cette sécurité exprime une foi dans la probité ou l’amour d’autrui, ou dans la validité de principes abstraits (le savoir technologique). » Anthony Giddens, Les conséquences de la modernité, Paris, L’Harmattan, 1994 [1990], p.41.